L’envie me prend, après le récit sur mon séjour en Syrie, de te parler de quelques aventures (plutôt mésaventures)survenues au cours d’un autre séjour celui-ci en Iran et en 1977. C’était encore le Shah qui régnait. Un régime qui n’était pas très démocratique….. mais beaucoup plus que celui qui suivit !!!!
Nous logions a Machhad, une ville à l’est de l’Iran…. Je n’ai pas la carte sous les yeux mais à peine 200 kms de la frontière Russe. Je n’entre pas dans les détails de nôtre arrivée, les problèmes liés à nôtre… profession, les difficultés d’obtenir un véhicule personnel (mon collègue et moi) c’était d’ailleurs le même qu’en Syrie et la même société qui nous employait . Le pipeline traversait tout l’Iran. Nous deux étions affectés sur un point spécial qui avait du être interrompu l’hiver précédent. Faut dire que la température, au cœur de l’hiver et à ce qu’on ma dit descendait au-dessous de -40 ° ! vraiment le climat continental car au cœur de l’été, c’était au dessus de +40 °
Après bien des discutions, nous avions obtenus, pour deux, un pick-up 4×4 qui nous rendait indépendants. On pouvait organiser nôtre travail et surtout nôtre retour à Mashad sans avoir à compter sur qui que ce soit, surtout qu’il faut le préciser, le dépôt où nous prenions le matériel et où nous faisions le plein était déjà à 100 kms de Mashad…. La route était relativement bonne … peu fréquentée… Mais quand nous arrivions au dépôt ( ça s’appelait le Mosduran) il nous restait encore 30 kms de piste pour nous rendre effectivement sur le lieu de travail. Le soir, retour… bonjour les kilomètres !!
Au bout d’une quinzaine de jours de ce régime, l’idée nous vint de réduire ce parcours. Il suffisait d’emmener au dépôt nos lits, tout nôtre couchage, quelques ustensiles de ménage, vaisselle (le minimum) et de nous faire apporter l’essentiel de nos repas par les collègues, ca nous éviterait toute cette route… et pas loin de 3 heures de repos supplémentaire. Il y avait sur ce dépôt de grandes tentes comme les militaires en utilisent en cantonnement. Il fallait seulement les vider du matériel qui y était entreposé… nettoyer un peu le sol. Il y avait une réserve d’eau…. on pouvait se laver sans une douche très rustique. Les conditions n’étaient pas idéales mais nous avions l’un et l’autre connus pire.
Le lendemain, nous nous installions. Le soir relax totale… Le matin presque une grasse matinée.
Il y avait à un bon kilomètre du dépôt un petit village, avec un boulanger qui faisait du pain en forme de crêpe. On appelle ça si je me souviens bien Chapati…. délicieux faut dire qu’il était cuit au feu de bois… et que le blé ne poussait sûrement pas aux engrais. Nous étions très satisfaits de nôtre décision… et on se marrait en voyant tous les autres rentrer à Mashad alors que nous étions déjà rafraîchis, allongés sur nos lits grillant une cigarette, (je fumais un peu à l’époque) un bon bouquin à portée de main…. le rêve .. ! ça dura peut-être une semaine, peut-être un peu plus. Un soir avant de nous coucher, sur la moustiquaire, une énorme araignée… Pour ma part, j’en avais jamais vu de pareilles. Armé chacun d’une pierre plate, on l’écrasa.
Mais ce soir- là, on passa nôtre guitoune en revue, on refit nos lits et sûrement qu’on dormit moins bien. Malgré tout, on appréciait tellement cette solution qu’on persistait encore quelques jours.
Et puis un soir, en faisant une balade avant que la nuit tombe, je rencontrai un iranien dont la fonction dans l’entreprise était de garder le dépôt la nuit.
Rencontrer ce personnage ne portait pas à conséquence…. On ne se comprenait pas ou si peu… Par contre, le serpent qu’il avait tué et qu’il tenait à la main, lui , m’intéressait au plus haut point. Il le tenait juste en-dessous de la tête, à bout de gras (bras pendant) et le corps du serpent traînait sur le sol encore une bonne longueur. Effrayant… J’en fis part à mon copain … Pour un peu, on aurait pris un tour de garde….
Dès le lendemain, on se renseigna sur les risques de faire ce genre de rencontre, mais avec un serpent vivant. Ça pouvait effectivement arriver. La montagne, ou colline qui nous entourait était nommée par le gens du cru « la montagne aux cobras »…. !!
Ici pas de possibilité de soins, de vaccins, mordu par un serpent, c’est la mort certaine…. Alors le jour même, en fin d’après-midi on a replié tout nôtre fourbi et, pas trop fiérot, on a rejoint nos collègues qui, a leur tour, se sont bien marrés, et comme par le passé nous avons refait les 200 kms journaliers.
Tôt le matin, nous quittions Mashad, avant que le trafic ne devienne intense. Nous nous arrêtions sur le marché pour acheter quelques fruits, des pastèques, histoire d’améliorer le menu… La route, dès la sortie de la ville s’étalait sur des kilomètres sans une habitation, juste un village à moitié route de nôtre destination…
Nous croisions souvent des bandes de chiens errants qui nous suivaient en aboyant férocement. IL n’aurait peut-être pas fait bon de descendre de nôtre véhicule…. Je ne m’y suis pas risqué. Une chose m’épatait souvent au petit jour, dans les premières clartés du matin quand une moto nous précédait de quelques kilomètres, de son tuyau d ‘échappement la fumée laissait une traînée dans l’air absolument pur et très peu de pollution….
De Mashad au Mosduran, il y avait deux ponts à franchir. Chacun d’eux surplombait un oued qui, depuis mon arrivée était toujours à sec…. Au plus un filet d’eau. Nous n’y prêtions d’ailleurs aucune attention particulière.
Il faisait tous les jours une chaleur écrasante. Je la supportais assez bien. Je savais qu’il y avait eu ce jour là un fort orage en montagne. Où nous nous trouvions, rien ne s’était passé, juste un assombrissement du ciel au loin, dans la montagne. Sur la route du retour, à proximité du pont, une ribambelle de voitures à l’arrêt sur le bord de la route.
Que se passe-t-il ? Nous nous approchons. Un véritable fleuve à la place de l’oued habituellement à sec. Le pont complètement submergé…. ou ne le voyait plus … que de la flotte et sur une largeur de approximativement 250m… Et comme le pont n’avait pas de rambarde, plus de repère ! Nous avions le choix de rester sur place, roupiller dans nôtre véhicule ne pas dîner et repartir au petit jour au chantier. Ça ne nous réjouissait pas trop… Mais personne non plus ne se décidait à traverser presqu’à l’aveuglette… et le courant était fort… ! L’eau charriait un tas de saloperies. IL ne fallait pas se laisser emporter… Après quelques hésitations, nous primes la décision de passer . C’était mon pote Maurice qui était au volant. A peine étions-nous engagés qu’on ne voyait plus que de l’eau … et plus de repère. Je calculais déjà comment j’essaierai de regagner la rive si jamais nous étions emportés par le courant. L’essentiel était de rester sur le pont. Debout sur le marchepied j’écarquillais les yeux pour voir où se situait le bord du pont qu’il ne fallait surtou pas franchir. Nous avions franchi à peu près le 1/3 de la distance quand un iranien (habitué des lieux) et qui se trouvait sur la rive opposée nous guida à distance… C’est tout à fait rassuré que nous avons terminé la traversée. Parvenu de l’autre côté, plus de problème. On a du arroser ça, faire un bon repas et passer une bonne nuit.
Le lendemain, l’oued était redevenu presqu’à sec. Dans son lit, au pieds des arches, des pierres , des arbres, des branchages… que des gens commençaient à déblayer. Nos allers-retours reprirent sans incident particulier… et puis un jour, nouvel orage. Nous redoutions que les ennuis recommencent comme précédemment. Cette fois, à l’accumulation de voitures, de camions et de gens , mais cette fois c’était le 1er pont, celui qui se situait plus près du chantier que de Mashad, nous nous doutions bien qu’il y avait problème….. Effectivement, et il était de taille.
Les choses s’étaient s’étaient passées comme la dernière fois,mais la grosse différence c’est pour le coup , le pont avait été emporté…. ! Devant nous un véritable fleuve…..mais impossible de le franchir. Nous avions nôtre journée de travail dans les pattes, la fatigue…. où dormir. Revenir au dépôt. Ça nous emballait pas non plus. Nous savions qu’il y avait une ville à la frontière russe SHERACH… Je crois. Ça se prononçait un peu comme « CHIRAC ».
Décision fut prise, mon collègue et moi d’aller jusqu’à cette ville, d’y trouver un hôtel, de faire une bonne nuit et de revenir dès le matin suivant. On demanda au responsable du chantier de l’argent iranien on fit le plein du 4×4 et en route ! Il y avait environ 80 kms de distance. Les heures avaient passé et quand nous arrivâmes à proximité de la ville, la nuit était tombée.
Si on s’était imaginé trouver ce qu’on trouve habituellement dans nos villes, il y avait de la déception dans l’air. Quelques maigres loupiotes, pas un chat dans les rues… on tourne un peu et nous tombons sur une place un peu plus éclairée. Un homme avec un turban passe à nôtre hauteur, nous l’interpellons. C’est un ouvrier, probablement un plâtrier car il est tâché de blanc. On se fait comprendre aisément. Quand il s’agit de manger et de dormir… pas besoin de traducteur…. Il nous donne les indications. D’ailleurs c’est pas loin de l’endroit où nous sommes. Nous remontons dans la guinde et nous arrêtons au lieu indiqué. Nous n’étions pas particulièrement mal à l’aise ni inquiets…. seulement cette impression de n’être vraiment chez nous. On entre dans ce que en France, on aurait pu appeler un immense salon de thé… pas des plus luxueux ! Avec une clientèle exclusivement masculine. Nous venons de franchir une frontière mais la religion, les mentalités sont les même. A peine la porte franchie….
silence total. Forcément on détonne un peu mon copain et moi… on a pas le look du coin. Et on est sûrement les seuls dans cette tenue. La plupart sont en sarouel djellaba, turban. Ça fait drôle mais on ne se démonte pas et on s’installe à une table. Nous commandons du thé et je crois de la pâtisserie…. pas question de demander un sandwich jambon beurre ! Après nous avoir reluqués ! Les gens se désintéressent de nous. Nous nous restaurons et demandons pour dormir s’ils ont une piaule. Quelques palabres et celui qui semble le propriétaire des lieux nous emmène dans une cour. Il y a des bâtiments probablement des appartements (minables) ou des chambres louées mais occupées. Au bout de ces bâtiments une échelle branlante. Il nous demande de le suivre. Pas de lumière …. heureusement la nuit est claire. Nous voilà arrivé sur une terrasse ( le toit du bâtiment). Sur cette terrasse, une espèce de baraque…. qui évoque pour moi un grand poulailler… Une ouverture, pas de porte, juste un morceau de tissu. Nous entrons. Une grande pièce rectangulaire. Pas un meuble, rien – juste au sol une douzaines de paillasses crasseuses – qui doivent servir depuis des décennies. L’idée de roupiller dans ce lieux ne m’enchante guère…. mais il est au moins 23 heures où aller. Avec ça que tout cela a l’apparence d’un coupe-gorge. On ne vit qu’une solution pour avoir la paix : on loue toutes les paillasses . Voilà nôtre hôte tout content. Pour lui une bonne affaire, pour nous la tranquillité. Pour éviter le contact avec la paillasse, j’ai pris une couverture de la voiture…. Et puis, avant de nous endormir, on a remonté l’échelle sur la terrasse… On ne sait jamais…..Finalement, on a pas mal roupillé.
Le lendemain , café et hop départ pour le chantier.
Finalement, nous nous en sommes assez bien tirés. Un des contrôleurs anglais qui avait eu la même idée que nous, à son arrivée dans la ville, au lieu de tomber sur un plâtrier, s’est trouvé nez à nez avec des policiers. Pour avoir franchi la frontière, il a passé la nuit au gnouf et a eu toutes les peines du monde à faire comprendre la situation aux flics.
Jusqu’à la fin de mon séjour le pont n’a pas été reconstruit. Ils ont dégagé les pierres qui gênaient. Et puis le monde est passée à gué